Les 4 erreurs à éviter pour apprendre un cours

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Nous avons tous connu ça quand on nous étions à l'école : devoir mémoriser et apprendre des leçons, des poésies ou autres et nous avons tous mis en place nos propres stratégies, nos propres techniques, parce que c'est vrai qu'à l'école on n'a pas forcément appris apprendre. Et malheureusement, souvent on fait des erreurs en cherchant à deviner les meilleures stratégies et ces erreurs nous suivent tout au long de notre vie et ça peut avoir de fâcheuses conséquences.

Erreur n°1 : apprendre par cœur

Quand j'étais élève au primaire, j'étais un très très bon élève. En fait j'apprenais mes leçons par coeur et ça m'a plutôt bien réussi parce que j'ai fini premier de la classe en CM2. Et j'ai même remporté un concours de récitation.

Ma technique était très simple il me suffisait de répéter répéter répéter le soir mais pas seulement. Le lendemain matin je reprenais mes leçons et je répétais répétais à nouveau ce qui fait que grâce à cette stratégie j'ai vraiment remporté un concours de récitation et j'ai terminé premier la classe. Puis, je suis arrivé au collège avec l'étiquette très très bon élève

Sauf qu'au collège ça c'est un peu gâté parce que apprendre par cœur ne me permettait pas forcément d’utiliser ce que je croyais savoir. Je ne voyais pas forcément le lien entre les questions qu’on me posait et ce que j’avais appris. J’avais aussi du mal en mathématiques à résoudre des problèmes parce que derrière l'apprentissage par cœur on peut avoir l'illusion de comprendre alors qu'en fait non pas forcément. J'ai donc eu beaucoup de mal au collège et arrivé au lycée ça a été une catastrophe parce qu’à ce moment là j'ai complètement coulé dans toutes les matières. J’appliquais toujours la même stratégie, celle de répéter et d’apprendre par coeur, et ça ne marchait vraiment pas. Pourtant, j'étais capable de réciter mes théorèmes, j'étais capable de réciter mes définitions mais face à un examen, face à une dissertation et bien j'avais l'impression de ne pas savoir quoi dire de ne pas être capable de répondre alors que j'étais capable de retrouver de tête les informations. C’était très étrange et c’était un vrai problème.

La bonne question que vous devez vous poser au départ, c'est pourquoi est-ce que vous devriez apprendre par cœur une information. Ca peut avoir du sens lorsque vous avez une poésie à restituer parce que évidemment vous devez respecter le style, respecter les mots de l'auteur, c'est l’essence même de la poésie. Vous pourriez en avoir besoin également si vous faites du théâtre parce que évidemment vous avez un rôle à tenir et en face de vous d'autres comédiens s'appuient sur ce que vous dites. Vous ne pouvez pas comme ça improviser. Mais au-delà de ces cas est-ce que c'est utile d'apprendre par cœur. Je prends l'exemple d'une personne qui aurait un discours à faire. Le problème c'est que devant une assemblée il peut y avoir un peu de stress et le stress a un effet inhibiteur bien connu qui peut avoir de fâcheuses conséquences : il nous paralyse.

Et ça vous aide peut-être déjà arrivé : vous avez un examen à passer et puis le jour J alors que vous avez appris par cœur tout à coup le doute... parce que vous savez que s'il vous manque un mot et bien c'est le trou de mémoire assuré et là le fil conducteur vous avez en tête ne fonctionne plus. Et si vous êtes face à ce fameux trou de mémoire de nouveau du stress va se sur rajouter au premier stress et ça va encore plus inhiber votre capacité à retrouver de tête. Et là pour le coup c'est compliqué. Donc apprendre par cœur n'est pas forcément la bonne solution.

D'ailleurs est-ce que vous savez d'où vient cette expression apprendre par cœur laissez-moi vous raconter l'histoire…

D'où vient l'expression "apprendre par cœur" ?

Nous sommes dans l'Antiquité à une époque où il la déesse Mnemosyne fascine les êtres humains. Elle est considérée comme la déesse de la mémoire. Son rôle au départ c'est de raconter des histoires aux autres dieux. Or, un soir, alors qu'elle raconte des histoires à Zeus le dieu des dieux, ce dernier la séduit et couche avec elle durant 9 nuits. Et chaque nuit, elle donne naissance à une Muse. Et oui, Mnemosyne, déesse de la mémoire est la mère des 9 muses ! Et les êtres humains, à cette époque là, rêve d’égaler le pouvoir divin de la mémoire. Car quiconque possède une bonne mémoire est l’égal d’un dieu ! Surtout qu’à cette époque, les enjeux sont réels ! A part la mémoire biologique, il n’existait pas de solutions pour retenir l’information et la partager…

Les humains se mettent donc en quête du pouvoir de Mnemosyne. Et à force de recherche on comprend trois choses et notamment le rôle des émotions. On s'est rendu compte que lorsque le cœur battait fort on retenait beaucoup mieux. Et à ce moment là, on a pensé que le siège de la mémoire se situait dans le cœur. Et c'est au Moyen-Âge, bien plus tard donc, que l’expression apprendre par coeur est née. Historiquement, apprendre par cœur signifiait apprendre avec passion, avec émotion. On est quand même bien loin de cette expression qu'on a tous en tête qui consisterait à prendre mot à mot.

Apprendre par coeur peut être un piège. Je ne vous conseille donc pas d'apprendre par cœur si vous êtes étudiant ou si vous avez un oral à passer ou si vous avez un discours à présenter. Car c'est tellement exigeant, ça prend tellement de temps, ça prend tellement d'énergie et que ça n'est pas forcément fiable. Apprendre par cœur peut vous faire prendre un certain risque. Clairement, quand on veut mémoriser des notions, un cours, ça n’est pas la meilleure méthode. Surtout, elle ne vous garantit certainement pas de comprendre les choses. Or quand on veut mémoriser efficacement, il vaut mieux favoriser la compréhension. Mais avant de vous en parler, j'aimerais d’abord aborder cette seconde clé, celle de la réactivation qui est fondamentale car elle permet de consolider l'information.

Erreur n°2 : ne pas réactiver

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Par Adrien Moyaux — Travail personnel, CC BY-SA 4.0, source
Je vais vous raconter une anecdote. Il y a plusieurs années de ça j'ai été amené à accompagner une étudiante dans ses études. Et à la regarder faire, je me suis retrouvé à l’époque où moi aussi je devais apprendre. Et je me suis rappelé cette contrainte d’être prêt le jour J. Et comme elle, je travaillais souvent fort la veille. On a tous connu ça, le bachotage. On révise la veille pour le lendemain. Car notre pédagogie contrôlante nous l'impose : il faut être bon le jour J. Et la tentation c'est effectivement de bachoter. Et le problème du bachotage, si vous voulez, c'est que vous êtes forcément dans une dynamique de mémorisation à court terme. Vous êtes prêt le jour J, mais après il y a des grandes chances pour que tout s'oublie. La preuve, c'est que si un trimestre plus tard on vous demande de repasser un examen à partir des connaissances que vous aviez mémorisée, vous avez l'impression d'avoir oublié beaucoup beaucoup de choses.

Mais essayons de comprendre ce phénomène. C'est en 1885 qu'un certain philosophe, Hermann Ebbinghaus a défini ce qu'on appelle la courbe de l'oubli. Cette courbe montre comment l'information est perdue au fil du temps quand le cerveau ne cherche pas à la conserver.

Grâce à sa découverte de la courbe de l'oubli, Ebbinghaus découvre les effets du surapprentissage qui nous apprend qu’une information suffisamment répétée, réactivée dans le temps se reteint sur du long terme.

Tout cela tend à confirmer qu'il faut bien répéter pour intégrer durablement une information. Oui, mais pas n’importe comment. On s'est rendu compte par exemple que non seulement il fallait bien apprendre une première fois, de façon sérieuse mais aussi qu'il fallait répéter et réactiver rapidement, idéalement dans les 24 heures. Puis un certain nombre de fois en fonction de la complexité de l'information et du niveau que nous avions donc au départ.

Et l'erreur que nous faisons souvent quand on veut apprendre quelque chose, c'est justement d'être dans cette dynamique de bachotage : on veut être prêt le jour J donc on s'entraîne la veille pour le lendemain et au final on est certainement performant le jour J mais lorsque le temps passe, il ne nous reste pas grand-chose. Ou alors cette sensation désagréable de n'avoir rien appris. Vous n’avez alors pas bien consolidé l’information. Vous ne l’avez pas suffisamment réactivée dans le temps.

Et une bonne façon de réactiver devrait se faire plutôt au réveil au lendemain d’un premier apprentissage. Des études ont montré effectivement que lorsque vous laissez passer une nuit et que au petit matin vous tentez de retrouver l’information que vous vouliez mémoriser et apprendre en rappel libre, c’est à dire sans aucune aide, aucun indice, vous optimisez jusqu'à 70% l'action finale de mémorisation. C'est donc une première clé que vous pouvez mettre en œuvre.

Car la réactivation est intéressante si vous l'impliquez après une bonne nuit de sommeil. Le sommeil a un rôle de consolidation. Il vous permet de structurer votre pensée et, au petit matin, lorsque vous tentez de retrouver l'information, vous êtes capable d'isoler ce qui vous manque. La réactivation est donc fondamentale, vous ne pouvez pas y échapper lorsque vous voulez apprendre efficacement une information. Pensez notamment aux langues étrangères:vous apprenez et ça fonctionne lorsque effectivement vous les utilisez et vous les réactivez dans le temps. Sinon au bout d'un moment vous oubliez.

Erreur n°3 : ne pas comprendre

Comprendre est fondamental pour mémoriser. Vous le savez. J’aimerais à ce sujet partager avec vous une étude qui a été faite à Rennes dans les années 90. Un chercheur que j’ai bien connu, Alain Lieury, anciennement directeur de recherche en psychologie expérimentale, s'est demandé ce qui pourrait expliquer la réussite scolaire au collège. Son hypothèse évidemment c'est qu'un bon élève comprend alors qu’un élève en difficulté comprend moins bien. Je me suis tout de suite reconnu dans cette étude car moi, au collège, j’apprenais par coeur. Mais en effet, je ne cherchais pas forcément à comprendre. Car depuis le primaire je m’étais habitué à réciter. Et je savais faire ça car j’étais un gros travailleur. Je passais beaucoup de temps à répéter. Et pourtant, je me trompais de méthode…

Mais qu’est-ce qui peut aider la compréhension ? Cette question, Alain Lieury se l’est posée avec son équipe. Et ils en ont déduit que le secret résidait probablement dans le vocabulaire. Que, probablement, les élèves performants comprenaient plus de mots que les autres. Il s’est alors demandé combien de mots un élève rencontrait au collège. Des mots du programme scolaire, uniquement ne langue française. Des mots qu’il faudrait idéalement comprendre...

Avec son équipe, il va suivre une classe de la sixième à la troisième sur 4 ans. Et il va découvrir quelque chose d'assez incroyable : les élèves au collège sont confrontés à environ 28 000 mots nouveaux.

Là je sais ce que vous vous dites. 28000 mots ? ça fait beaucoup : ça fait 7000 mots par an. la question qu'il s'est ensuite posée avec son équipe, c'est est-ce qu'il y a un lien entre la réussite scolaire et le nombre de mots compris ? Et là, sans surprise, il découvre que les très bons élèves, les premiers la classe, sont capables d'expliquer en moyenne 16000 mots contre 8000 mots pour les moins bons élèves. Donc, une des clés de la compréhension, c'est le vocabulaire.

Et c'est très important, parce que ça vous le savez, lorsque vous avez du mal à retenir, c'est souvent que l'information n'est pas très claire. Et comme elle n'est pas claire vous ne la comprenez pas bien. Et si vous ne comprenez pas bien une information il y a de peu de chances pour que vous puissiez la retenir efficacement, et donc la mémoriser, l’apprendre.

Pour mémoriser et apprendre un cours, la compréhension est fondamentale car elle s'appuie sur votre mémoire sémantique qui vous permet de clarifier l'information. Pour comprendre, une solution simple est d’optimiser votre vocabulaire toute votre vie. Si vous avez des enfants qui sont encore scolarisés vous pouvez les aider en leur expliquant le sens notamment des préfixes et des suffixes. On sait aujourd'hui que si on est capable de comprendre le sens des préfixes et des suffixes on est capable de comprendre jusqu'à 70% des mots de langue française. Donc faites un effort et travaillez sur les mots : car plus vous comprendrez mieux vous mémoriserez.

Erreur n°4 : ne pas s'auto-évaluer

Une clé fondamentale pour apprendre une notion, un cours, c'est l’auto-évaluation. Qui permet ce qu’on appelle le retour sur erreur supervisé. Dans le point précédent, il était question de réactivation. L’auto-évaluation est une façon dynamique, active de réactiver l’information et de la consolider efficacement. Autant la réactivation en rappel libre, au matin, permet de faire un effort de récupération, autant l’auto-évaluation vous permet de contextualiser cette même information.

Vous pouvez vous auto-évaluer par des exercices, par des QCM ou en jouant deux par deux avec un autre apprenant qui suit la même formation. Et vous challenger à travers donc des questions et des réponses ou encore des mises en situation de façon à contextualiser l'information. De cette façon, vous mettez en scène l’information et sollicitez plutôt une mémoire épisodique, fondamentale pour favoriser le rappel.

Plus vous multipliez les auto-évaluations, plus vous favorisez ce qu’on appelle l’apprentissage multi-épisodique. Formalisé par le même Alain Lieury dans les années 90, cette approche favorise la réactivation d’une même information dans des contextes différents. Elle vous permet de prendre conscience de vos lacunes, vos manques et de rectifier le tir.

Pour finir, vous pourriez aussi vous lancer un défi simple : celui de devenir enseignant. Souvent, on dit qu’apprendre consiste à atteindre cette capacité à enseigner à un enfant de 8 ans. Une excellente façon pour vous de bien comprendre, vous challenger et avoir un retour immédiat : si la personne à qui vous souhaitez transmettre n’a rien compris, c’est que probablement ça n’est pas non plus si clair pour vous…
Pour conclure, rappelez-vous que pour apprendre efficacement un cours vous devez éviter ces erreurs qui consistent notamment à apprendre par cœur ou tout simplement à ne pas réactiver ou à ne rien comprendre ou encore à oublier de vous auto-évaluer. En agissant sur ces quatre étapes, vous vous donnez une grande chance non seulement de mémoriser mais aussi d'apprendre.
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